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Base Elèves, Sconet, BINE ( Base Identifiant National Elèves)

Crézy ( Yonne) : La “base élèves” inquiète encore les parents, et à juste titre !

Article de Christine Tréguier, Rue 89, publié sur le site de la LDH Toulon

lundi 21 juillet 2008, par CGT Educ’Action 94

Nous publions ci après un extrait de l’article de la LDH Toulon lié à un débat qui a eu lieu à Crézy ( Yonne) sur Base élèves.... qui continue, en effet d’inquiéter tout le monde.....( voir aussi article sur le site de la CGT Educ Action 94 : Base élèves : la lettre de la CNIL au ministère de l’éducation confirme bel et bien nos inquiétudes et nos craintes !

La “base élèves” inquiète encore les parents, et à juste titre
par Christine Tréguier, Rue89 [2], le 17 juillet 2008 ( via le site de la LDH Toulon)


La "base élèves" inquiète encore les parents, et à juste titre
Par Christine Tréguier, 17 juillet 2008, (sur le site de Rue 89)

Le ministère de l’Education nationale a beau vouloir apaiser la contestation autour du fichier "base élèves" [3] et lever les sanctions qui pèsent sur les directrices et directeurs d’école rétifs, les parents d’élèves ne sont pas rassurés pour autant.

Dans le petit village de Cézy (Yonne), par exemple, quelques mères se sont inquiétées de l’usage qui serait fait des renseignements que la directrice leur demandait de fournir sur leurs enfants. Insuffisamment informée par sa hiérarchie, elle a, de bonne foi, expliqué que seules les données habituelles requises lors de l’inscription de l’enfant leur étaient demandées (ce qui est exact), et qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter (ce qui est omettre toutes les autres données jusqu’ici enregistrées par la directrice).

Les mères d’élèves ont donc cherché par elles-mêmes sur Internet et trouvé les informations publiées par la Cnil, les communiqués de la FCPE et aussi l’excellent suivi effectué au jour le jour depuis quatre ans par la Ligue des droits de l’homme de Toulon.

De plus en plus inquiète, l’une d’elles, que nous appellerons Virginie, a décidé d’organiser, au pied levé, un débat public. Il a eu lieu le 4 juillet, avant les vacances. De ce débat (que j’ai eu le plaisir de modérer), riche malgré les absences de l’adjoint au maire et de la directrice, il est ressorti un constat et plusieurs questions.

Dysfonctionnements à tous les étages

Le constat, d’abord : la diffusion d’informations sur laquelle misait le ministère pour expliquer "base élèves" et désamorcer l’opposition des collectifs (forcément paranos) ne fonctionne pas. La preuve en est, cette directrice, qui n’a pas été formée à "base élèves" et ne sait donc pas quel sera le sort des informations qu’elle recueille (vers quels services remonteront-elles ?).

C’est à l’échelon régional et départemental que l’on trouve les plus graves dysfonctionnements. Les inspections d’académie (IA) et les inspecteurs de l’Education nationale (IEN) ne renseignent pas assez les chefs d’établissement. Du coup, ceux-ci peinent à répondre aux inquiétudes des parents.

Le maire et son conseil non plus ne sont pas informés. C’est Virginie qui les a alertés. Lorsque la mairie s’est intéressée au sujet, elle a trouvé des données insuffisantes et pour le moins opaques : elle a demandé à être mieux informée avant de prendre une quelconque décision concernant ce fichier.

L’ignorance de la mairie est excusable. M. Santoni, qui pilote au plus haut niveau du ministère le déploiement de "base élèves", ignorait lui-même, il y a encore une semaine, quelles données seraient conservées. Constatant que "ça se passe mal", il espère qu’un vaste débat public sera lancé dès la rentrée pour remettre à plat ce dossier si mal engagé depuis plus de quatre ans.

Autres menaces : Sconet et BINE

Ce débat serait d’autant plus utile que les inquiétudes des parents, enseignants et collectifs se déportent désormais sur Sconet, l’équivalent de "base élèves", mais pour le secondaire, lancé en 1995.

Sconet, c’est base élèves pour les grands Véritable outil de gestion et d’évaluation de la filière éducative, Sconet contient beaucoup plus d’informations que "base élèves", et toutes ne sont pas forcément "Cnil-compatibles", même si l’autorité indépendante a, en son temps, donné son aval. La liasse des arrêtés portant modifications de Sconet est impressionnante, et peu d’experts en droit se sont pour le moment penché sur le problème [4].

Mais c’est surtout la "base identifiant national élèves" (BINE) qui soulève aujourd’hui curiosités et craintes. La BINE est gérée par la Direction de l’évaluation, de la prospective et des statistiques du ministère de l’Education nationale, la même qui est responsable des fameux panels d’études longitudinales, comme le "Panel des 35 000" qui a récemment fait couler beaucoup d’encre.

Lancée en même temps que "base élèves", la BINE se remplit à mesure du déploiement du fichier du primaire, chaque élève se voyant attribuer un numéro identifiant unique qui le suivra tout au long de sa scolarité. BINE grandira avec les gamins, absorbant progressivement Sconet, pour devenir une véritable base nationale de tous les enfants scolarisés dans le public, le privé et à domicile…

L’envergure de ce fichier et l’absence d’informations sur ce qu’il contient et ce à quoi le destine précisément le ministère inquiètent fortement les collectifs, et la Ligue des droits de l’Homme en particulier. La fonction première de ce numéro national unique de l’élève (INE) est de figurer aux côtés de l’état civil dans tous les fichiers scolaires et de s’y substituer lorsqu’on souhaite rendre anonymes les données. L’interconnexion de tous les fichiers scolaires est donc engagée ; le risque d’une connexion avec d’autres fichiers plus sécuritaires ou avec la Caisse d’allocations familiales est réel [5].

Un numéro bavard

L’INE pourrait devenir aussi bavard que le numéro de Sécurité sociale (prévu initialement comme identifiant éléves mais refusé par la Cnil). Aujourd’hui interconnecté avec divers fichiers administratifs, celui-ci faisait dire à la Cnil, lorsqu’elle fut créée en 1978 pour éviter ce type d’interconnexions dangereuses pour les libertés :

"La généralisation de son usage faciliterait grandement les rapprochements de fichiers sans cesse plus importants, l’extension de l’usage du NIR [NDLR. numéro d’inscription au répertoire, le numéro de sécurité sociale] reste, à elle seule, une menace".

Trente ans plus tard, alors qu’on s’apprête à célébrer l’anniversaire de l’autorité indépendante, ces libertés se tarissent… dès la maternelle.

Mais revenons à Cézy. Certaines questions ont été fréquemment posées par les mères lors du débat :

"Si je ne veux pas que mes enfants soient dans le fichier, qu’est-ce que je peux faire ?"

Ou…

"Est-ce que je peux faire corriger ou supprimer les données enregistrées sur mon fils si elles sont fausses ou gênantes ?"

De toute évidence, le ministère et les inspecteurs d’académie n’ont pas prévu de canal de retour pour ce genre de doléances. Une omission qui pourrait être rectifiée rapidement. Car, si pour le ministère, le dossier "base élèves" peut paraà®tre réglé, il ne l’est pas du tout pour la "base".

La rentrée scolaire promet d’être animée.

Christine Tréguier

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