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Repères revendicatifs - Une profession, des métiers

mardi 15 février 2005, par CGT Educ’Action 94

Enseignants, personnels d’éducation, de direction, instituteurs, professeurs, surveillants... aux yeux du public, nous ne formons qu’un :
"le monde enseignant".
Cette appellation désigne un amalgame perçu comme un monde à part, refermé sur lui-même et jaloux de ses prérogatives.

La profession enseignante se structure et se reconnaà®t :
- par le nombre... quelque 800 000 enseignants, personnels d’éducation,
de direction,
- par leur place dans l’institution et leur connaissance de celle-ci,
- par une certaine identité de pratiques professionnelles : transmettre
un savoir, une culture,
- par une histoire commune à laquelle chacun s’identifie peu ou
prou... celle des "serviteurs" de la République,
- par la recherche permanente d’une reconnaissance sociale, d’une
place identifiée et reconnue dans la société.
Parallèlement, on ne peut nier la réalité des métiers d’enseignant.
- Selon le lieu d’exercice (école, collège, lycée), selon l’environnement
de celui-ci (milieu rural, urbain, ZEP...), l’acte éducatif ne recouvre
pas les mêmes choses.
- Selon les statuts des personnels : instituteurs, professeurs des
écoles, PEGC, AE, certifiés, PLP, agrégés... Dans le même
établissement peuvent se côtoyer des personnels de statuts différents
et diverses situations de précarité.
- Selon le travail : par exemple, enseigner l’anglais en collège peut
représenter des charges de travail différentes (15 h/18 h, classes
entières/½ groupes...).
- Selon les revenus différents : agrégés/certifiés par exemple.

LES MÉTIERS S’APPRENNENT

Former pour transformer, transformer la formation
La professionnalité enseignante ne peut se réduire ni à la vocation,
ni à un référentiel de compétences.
Enseigner est un métier qui s’apprend.
Les IUFM (instituts universitaires de formation des maà®tres) sont
confrontés à une absence de repères. Au cœur des contradictions et
parfois des frustrations ressenties, ils constituent, néanmoins, un
progrès. Ils sont la traduction d’un niveau de recrutement commun et
d’une formation professionnelle commune croisée entre le premier et
le second degrés. D’autre part, le métier étant de moins en moins
attractif, les difficultés de recrutement persisteront.
L’identité renouvelée de nos métiers passe par une approche globale.
Nous refusons de limiter le débat éducatif aux seuls aspects de
disciplines, de méthodes ou de pédagogie. Ces questions passent à 
côté de l’avenir des élèves.
Nous devons encourager d’autres questions plus ouvertes :
Quelle reconnaissance des qualifications, quelles interventions dans
la définition de nos missions, de nos moyens et de nos objectifs ?
Comment permettre une promotion par l’Ecole, un accès
émancipateur aux savoirs pour l’ensemble d’une classe d’à¢ge ?
Ces questions ne peuvent pas être résolues par les seuls enseignants.
Une pr prof of ofession, ession, des métier métiers
Pour cela, l’IUFM doit accueillir l’ensemble des personnels intervenant
dans l’Education nationale (y compris les personnels issus des
concours internes, réservés et examens professionnels).
L’IUFM doit former, dans le cadre de la formation initiale, l’ensemble
des adultes intervenant dans l’Education nationale. Cela inclut les
personnels d’autres ministères (jeunesse et sport, culture, justice...)
ou des collectivités territoriales, les intervenants extérieurs, ...
L’IUFM devrait offrir également aux représentants des parents
d’élèves des formations adaptées : connaissance du système éducatif,
rôle des parents dans les différents conseils...
A terme, les IUFM doivent devenir les instituts universitaires de
formation aux métiers de l’éducation (IUFME).
Le plan pluriannuel de recrutement et l’annonce de la réforme des
IUFM n’ont pas pris en compte les moyens pour transformer l’école.
Le recours massif aux listes complémentaires dans le premier degré
et des postes non pourvus dans le second degré ont montré le refus
persistant du ministère d’avoir une politique prévisionnelle en ce
domaine.
La CGT doit aider à passer de la critique de l’Ecole à une Ecole
critique.
Les dix pistes de réflexion qui suivent, fruit des débats menés en
particulier dans le collectif IUFM de la CGT, sont une contribution
dans ce sens.
Quelle égalité devant les concours ?
L’enseignement supérieur est le reflet de la sélection sociale.
Nous demandons la revalorisation conséquente et l’extension des
bourses, la gratuité des droits d’inscription, la construction de logements
étudiants à loyer modéré. Le système d’aides directes et indirectes
géré par les CROUS doit aboutir à une allocation d’étude
garantie (revenu minimum étudiant) à tout étudiant.
Le niveau II (licence générale ou professionnelle, équivalence par
validation des acquis professionnels) est aujourd’hui la base du
recrutement de tout enseignant.
L’année de préparation aux concours doit être validée par un diplôme
de Bac + 4.
Cela permettra aux étudiants en échec aux concours de ne pas
avoir perdu une année.
Pour permettre une démocratisation de l’accès aux concours, il faut
mettre en place un système de pré-recrutement dans le cadre de
cycles préparatoires.
Les salariés (MI-SE, Aides éducateurs, non titulaires, ...) doivent se voir proposer une offre de formation adaptée dans l’IUFM.

L’architecture des concours

On pourrait envisager une épreuve commune à tous les concours
du premier et du second degrés sur la connaissance et les enjeux du
système éducatif.

Dans le premier degré, on pourrait envisager la possibilité, à la
demande du candidat, au niveau du concours, de postuler sur une
ou plusieurs académies à partir d’un concours national aux épreuves
identiques sur tout le territoire.
Dans le cadre de la polyvalence, des options doivent être prévues
pour valoriser des dominantes.
Terrain et théorie
On ne peut former un enseignant entre septembre et mai de l’année
suivante. Nous refusons la mise immédiate en responsabilité. Considérer
les stagiaires comme moyens d’enseignement nuit à la qualité
de leur formation. Une formation progressive programmée, accompagnée,
doit se faire sur deux années scolaires.
Cela signifie un va-et-vient constant entre cours à l’IUFM et périodes
de stage dans des classes de différents niveaux (ou dans différents
types d’établissements). Si la titularisation intervient au bout d’un an
de formation, les néo-titulaires qui effectueraient un demi-service
devraient avoir encore, pendant cette première année, une formation
complémentaire à l’IUFM (de l’ordre d’une journée par semaine).
La formation théorique est nécessaire à partir de problématiques de
terrain. Les stagiaires doivent pouvoir confronter leurs expériences.
Le mémoire professionnel peut servir de cadre expérimental. Il ne
devrait plus être un élément de titularisation mais une réflexion pratique
et méthodologique. Il constituerait un élément de validation de la
formation à bac + 5 (mastaire). Il serait un élément à prendre en
compte dans une formation diplômante de formateur de premier degré
ou de second degré.
Chaque stagiaire doit recevoir une formation sur le système éducatif
et ses enjeux, avec intervention des organisations syndicales représentatives.
Transversalité et spécificités
Une démarche transversale de formation doit, non seulement intégrer
une dimension pédagogique (violence, hétérogénéité, orientation, ...) mais aussi statutaire (responsabilité, droits et obligations).

Un temps de formation devrait porter sur un projet culturel. Cela
permettrait des échanges à partir de compétences croisées et
communes générales, techniques et professionnelles.
Cette démarche devrait permettre de rencontrer des personnels
municipaux, d’Etat (culture, justice, ...), associatifs (sports, musique,
...) et des salariés du tissu économique, responsables d’organisations
syndicales...
L’accueil des parents et de leurs représentants doit être inclus dans la
formation.

Tout enseignant devrait recevoir une formation sur la maà®trise de la
voix, l’animation de réunion, la pédagogie différenciée, la construction
de projet, et sur les responsabilités juridiques...
Il est indispensable que tout enseignant bénéficie -au début et au
cours de l’exercice de sa profession- d’une formation en matière de
psychologie des jeunes et de façon générale, en matière de sciences
de l’éducation.
Les spécificités liées à l’à¢ge des élèves, aux pratiques pédagogiques
propres au primaire et à la diversité du secondaire, doivent être
abordées dans le cadre de la formation initiale.
Contenus et modalités de formation à l’IUFM

Les stagiaires du 2nd degré et les listes complémentaires ne doivent
plus être des moyens d’enseignement.
Pour le stage en responsabilité dans les établissements, les stagiaires
devraient être affectés, dans la mesure du possible, par deux, en
doublette avec un tuteur-conseiller pédagogique volontaire. Les binômes
de stagiaires sont constitués par dominante dans le premier
degré, par discipline dans le second degré.
Chaque stagiaire, dans le cadre de stages d’observation, devrait
découvrir les différents cycles dans le primaire, collège, lycée dans
le second degré. Mais aussi chaque stagiaire devrait pouvoir effectuer
un stage d’observation dans le primaire, le secondaire général,
technologique et professionnel autour des années charnières : fin de
cycle 3/6è, 3è/seconde générale ou professionnelle.
Le stage en entreprise, obligatoire pour les disciplines technologiques
ou professionnelles, devrait être ouvert sur l’ensemble des activités
périphériques de l’école (culture, sport...).
L’expérience professionnelle de chaque stagiaire devrait être prise
en compte pour le dispenser de tout ou partie de certains stages ou
en approfondir d’autres.
Formateurs, projet d’équipe et équipe de projets
Le mode de recrutement actuel n’est pas satisfaisant. Le mode de
recrutement de formateurs devrait intégrer une démarche d’équipe.
Cette démarche s’appuierait sur un travail préalable réalisé dans les
établissements, intégrant des stagiaires. Les formateurs de l’IUFM, y
compris les maà®tres de conférence et professeurs d’université,
devraient effectuer une partie de leur service ou de leur recherche
dans les établissements. Les formateurs du premier et du second
degré devraient voir reconnaà®tre leur qualification par des diplômes,
des avancements de carrière, des aménagements de service.
Entrées et sorties du métier
Le suivi annoncé des néo-titulaires pendant les premières années
est une avancée. Il doit s’accompagner d’une réduction horaire
hebdomadaire.

Le métier d’enseignant doit ouvrir sur des spécialisations (AIS), des
fonctions d’encadrement (chef d’établissement, inspecteur). Il doit aussi
permettre une mobilité par détachement dans d’autres administrations
grà¢ce à une formation continue adaptée et ouverte.
L’évaluation fait partie de la formation
L’IUFM a une fonction de "certification" mais la structure doit offrir un
soutien aux enseignants en difficulté.
Pour les stagiaires, les objectifs de la formation doivent être annoncés
et négociés avec eux en fonction de leur expérience. Lorsque des
difficultés existent, elles doivent être explicitées et des solutions
avancées. Ce n’est qu’à l’issue de la mise en œuvre de ces pistes
que l’évaluation doit intervenir.

Actuellement, la titularisation est opérée à partir de trois éléments de
validation : la formation commune, le stage en responsabilité, le
mémoire .
Une grille d’évaluation nationale doit servir de support à chaque jury.
Le jury doit motiver une décision de refus de titularisation et proposer,
si nécessaire, des formations complémentaires. Le droit au
redoublement doit être garanti.
La démocratie dans les IUFM
Les étudiants et professeurs stagiaires sont des adultes en formation.
Ils doivent avoir toute leur place dans les lieux de décision.

Le Conseil scientifique et pédagogique (CSP) doit devenir un conseil
avec une représentation égale des enseignants et formateurs, des
personnels IATOSS et des stagiaires. La représentation des usagers
doit être aussi renforcée dans le CA. Celui-ci devra se réunir au
moins quatre fois par an et disposer de droits d’intervention étendus.
Il faut un mode d’élection et une date uniques pour tous les IUFM.

L’autoformation à défaut d’accès à la formation continue

L’autoformation est souvent la seule réponse aux évolutions des
programmes, des méthodes et des techniques.
Le formation continue des personnels est une obligation des IUFM.

Tous les personnels devraient pouvoir bénéficier d’une formation continue sur leur temps de travail, dans la proportion de 10 % du temps travaillé, avec prise en charge des frais de déplacement, y
compris au sein d’un groupement de communes.

Le choix d’un stage de formation revient à chacun et ne doit pas être soumis à la seule règle de conformité avec le projet d’établissement.
L’UNSEN-CGT dénonce toutes les tentatives qui sont faites d’imposer
la formation continue hors de ce temps.

Les moyens doivent être dégagés pour assurer des formations et
des remplacements. Une validation diplômante de ces formations doit
déboucher sur une reconnaissance salariale.
Les enseignants doivent aussi pouvoir postuler sur les plans de
formation de l’ensemble des fonctionnaires.

LES MÉTIERS ÉVOLLUENT

Comme nous l’avons souligné à plusieurs reprises, nos métiers évoluent car les personnels sont confrontés à des transformations de natures diverses : massification de l’enseignement, exclusion sociale,
nouveaux contenus, développements des multimédias...

Le travail interdisciplinaire, le travail collectif, le travail sous forme de projets se développent.
L’ouverture de l’Ecole et les nombreux liens à construire avec les autres acteurs sociaux, culturels et économiques contraignent les personnels à travailler autrement.

Confrontés à toutes sortes de difficultés, les personnels recherchent des solutions dans d’autres formes d’organisation.
Dans le même temps, le ministère impose de nouvelles formes de travail, appelle à la "co-intervention", la "co-disciplinarité", la "coresponsabilité"
pour obtenir l’adhésion de tous, et ceci sans moyens
appropriés, sans prendre le temps d’intégrer la réflexion émanant des équipes de terrain et des chercheurs.
La publicité et la mise en valeur des actions innovantes ne peuvent suffire.

Pour autant, devons-nous rejeter des formes de travail que nous prônons depuis des années ?
Ces nouvelles formes de travail exigent, entre autres :
- une formation initiale et continue répondant à tous les besoins exprimés par les personnels ;
- des équipes stables. Elles ne peuvent s’accommoder d’effectifs insuffisants et de personnels en situation précaire ;
- une reconnaissance du travail collectif en termes de concertation, d’évaluation ;
- une réelle démocratie au niveau de l’établissement ;
- une institutionnalisation des relations avec les autres acteurs ;
- une réflexion sur les financements, sur l’architecture scolaire ;
- une révision des textes en matière de responsabilité ;
- une révision des programmes d’enseignement en matière de cohérence, d’approche interdisciplinaire...