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Cahier de textes et espaces numériques C’est comment qu’on fait quoi pour aller où ?

Article d’Infosden 93 mardi 8 septembre 2009

mercredi 18 novembre 2009, par CGT Educ’Action 94

De nombreux collègues en collège et en lycée ont sans-doute découvert à la prérentrée une nouvelle injonction non concertée sur leur travail : plus de cahiers de textes papiers, tout sera en ligne !
C’est l’application de la circulaire de rentrée : : "Plusieurs académies expérimentent l’emploi du cahier de textes numérique, tandis que d’autres l’ont déjà largement développé. Vous vous attacherez à sa généralisation".
En effet, depuis deux ans, les collègues de collèges ZEP et d’autres établissements ont essuyé les plà¢tres. Sous l’effet de la précipitation pour faire à la va-vite des vitrines, ils ont constaté de nombreuses pannes dans les systèmes installés, et surtout le grand écart entre les prescriptions pour les utiliser et la pauvreté et/ou la vétusté du matériel mis à disposition dans les bahuts.
Vigilante sur les bouleversements que le numérique engendrent sur notre charge et nos conditions de travail, sur la nature et le sens de notre métier, la CGT Educ’Action a discuté d’un premier état des lieux avec le conseiller tice du recteur de l’académie de Créteil . Celui-ci a reconnu l’extrême disparité , les inégalités des moyens matériels mis à disposition des collègues, particulièrement dans les collèges et les écoles, à tel point que la simple évaluation de l’état de ces moyens reste déficiente. La CGT Educ’Action a interpellé le conseiller du recteur sur la dilution des responsabilités dans ce domaine : entre les prescriptions du ministère et des rectorats d’une part, les attributions des collectivités territoriales d’autre part, les équipes sur le terrain sont bien en peine pour trouver des interlocuteurs qui assument leurs engagements en cohérence.
Plus préoccupant encore , et le conseiller du recteur ne l’a pas démenti, la carence en postes de personnels qualifiés reconnus et stables pour former, accompagner, aider les collègues dans l’utilisation des TIC, perdure et s’aggrave dans le contexte actuel de compression budgétaire. Il est aberrant, contre-productif et inadmissible que des collègues déchargés tice, normalement pour former et accompagner les enseignants , se retrouvent complètement accaparés par des tà¢ches de maintenance des matériels du fait que ce type d’emploi est toujours défaillant dans les établissements scolaires. Il est aberrant, contre-productif et inadmissible que de jeunes collègues soient parfois sommés sous la pression d’accepter des décharges TIC pour remplir ces tà¢ches.

Ces réalités expliquent que les premiers effets d’annonce ronflants sur la généralisation des ENT, des "cartables en lignes" ont été révisés à la baisse puisqu’il n’est plus question dans la circulaire que du cahier de texte numérique. Il est vrai qu’un espace numérique mettant 24h sur 24 les familles en situation de demander des comptes sur les activités d’enseignement , la vie scolaire etc. suppose que les agents du service public soient en situation de répondre en continu à de telles attentes. C’est une perspective d’alourdissement de la charge de responsabilité et de travail de ces agents sans commune mesure...
Au premier abord, compléter le cahier de texte en ligne ne semble pas être une astreinte de nature différente de celle relative à la version papier. Pas si simple. Renseigner le cahier de texte papier n’a jamais figuré dans aucun document officiel relatif aux missions des enseignant ; cette obligation n’est régie aujourd’hui que par une circulaire de ...1961 !Elle prévoit que ces renseignements sont vérifiés par les chefs d’établissements, qu’ils sont " à la disposition des autorités universitaires, notamment des inspecteurs généraux, à l’occasion de leurs visites", enfin qu’ils sont à la disposition des élèves. Ils doivent être conservés 5 ans. Cette circulaire ne prévoit pas la mise à disposition directe aux familles, contrairement à une idée reçue.
La mise en ligne change la donne : le cahier texte peut devenir un outil de surveillance continu et immédiat sans prise de distance et sans dialogue, par des autorités autres que les inspecteurs d’une part, par les familles d’autre part. Si l’outil est un progrès indéniable pour la communication et la mutualisation des enseignements, les craintes de nombreux collègues d’une ére "big brother" d’hypercontrôle, réifiant et perturbant la sérénité indispensable à leur travail, n’en sont pas moins fondées.
L’évaluation des enseignants risque de se détériorer gravement si les inspecteurs prennent prétexte du cahier de texte numérique pour abandonner leurs visites et déléguer aux chefs d’établissement le contrôle pédagogique via cet outil.

Enfin, il est certains que si les enseignants ne sont pas capables d’imposer des gardes-fous sur les usages du cahier du texte numérique, comme par ailleurs sur l’usage du mail professionnel, il y aura de fait une extension du "télé-travail" alourdissant par l’invasion à domicile un temps de travail depuis longtemps déjà accru par de nombreuses missions et tà¢ches qui débordent de leur service.

C’est pourquoi il est urgent que tous les collègues se saisissent de ce sujet, qu’ils fassent débat, qu’ils portent des analyses et des revendications communes. L’enjeu des usages du numérique sur nos conditions de travail et sur le sens de notre métier se retrouve aujourd’hui de manière similaire bien au-delà des salariés du service public d’éducation. Il faut unir et organiser ces analyses et ces revendications sur le terrain pour imposer nos choix sur cet enjeu. La CGT est une force au service de cette appropriation et de cette expression collectives.